“Le Cauchemar” de Füssli : les secrets d’un chef-d’œuvre érotico-démoniaque ?



Le 25 avril 1782, une foule élégante se presse à la Somerset House de Londres, où la Royal Academy organise sa traditionnelle exposition d’été. À l’intérieur du Grand Salon, parmi les tableaux qui tapissent les murs jusqu’au plafond, une œuvre attire l’attention de tous. C’est une toile de taille modeste présentant une femme d’une blancheur spectrale émergeant des ténèbres. Elle est étendue inconsciente, le buste et la tête pendants sur le bord d’un lit. Mais, soudain un sentiment d’horreur saisit le visiteur : un petit monstre le toise de ses yeux globuleux, accroupi sur la poitrine de la belle, tandis qu’une tête de cheval fantomatique surgit d’entre les rideaux. Sous l’œuvre, un titre : Le Cauchemar. 

Son auteur, Johann Heinrich Füssli (1741–1825), est déjà connu du public britannique. Mais à 42 ans, le Suisse n’est pas encore membre permanent de la Royal Academy. Il lui faut un coup d’éclat. Et au milieu des portraits raffinés et des paysages bucoliques, cette toile a de quoi stupéfier. « Shocking ! », écrira le romancier Horace Walpole au lendemain de l’événement. « Un cauchemar sur la poitrine de l’art britannique », selon le critique William Hazlitt. Il est même déconseillé aux âmes sensibles de s’approcher de trop près. La réputation du « Suisse fou » est faite. Une rumeur va même circuler : l’homme se nourrirait de porc avarié et consommerait de la drogue pour mieux exciter son imagination…

Mais que représente donc cette insolite réunion nocturne ? Pierre Curie, co-commissaire de l’exposition « Füssli, entre rêve et fantastique » qui consacre une première rétrospective française à l’artiste depuis 1975, revient pour Beaux Arts aux origines de ce chef-d’œuvre délicieusement gothique devenu une icône de l’histoire de l’art. Si la version originelle n’a pu faire le déplacement cet automne depuis Détroit où il est jalousement conservé, Le Cauchemar nous hante à Paris à travers deux petites doublures peintes plus tardivement, mais non moins glaçantes. L’occasion de découvrir plus largement la personnalité hors norme de Johann Heinrich Füssli et de ses œuvres sombres plongeant dans les tréfonds de l’inconscient.

Lire aussi article :  Toulouse : BitcoinInfinityDay - bitcoin.fr

Texte : Florelle Guillaume

Arrow

Füssli, entre rêve et fantastique

Du 16 septembre 2022 au 23 janvier 2023

www.musee-jacquemart-andre.com

Arrow

À lire pour aller plus loin :

“Le Fantôme d’une vie selon Füssli” de Nathalie Pourcel



Source link