Le Bon Marché : au bonheur des œuvres


Prune Nourry, L’Amazone Érogène

Prune Nourry, L’Amazone Érogène, 2020

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Bois, plume, laiton • © Le Bon Marché Rive Gauche

Une cible géante, rayée de couleur chair et de blanc, un arc et une cascade monumentale de flèches flottent actuellement au cœur du Bon Marché, de part et d’autre des escalators à carreaux mythiques dessinés par Andrée Putman. Cette installation spectaculaire de l’artiste Prune Nourry (née en 1985) s’inscrit dans la série de cartes blanches lancée il y a cinq ans par la maison en hommage à son couple de fondateurs.

Car déjà en leur temps, Aristide et Marguerite Boucicaut, collectionneurs passionnés, soutenaient les artistes, allant jusqu’à créer, en 1875, une Galerie des Beaux Arts où exposer les refusés du Salon officiel. Afin d’honorer leur mémoire et leur passion, le Bon Marché entame en 1989 une collection d’art contemporain, puis en 2012 une collection de mobilier et de design, lesquelles font aujourd’hui l’objet de visites thématiques. L’occasion de glisser, çà et là, des anecdotes sur l’architecture du lieu, une merveille en soi.

Le Bon Marché avant les travaux de Boileau

Le Bon Marché avant les travaux de Boileau, 1852

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affiche • © Universal History Archive / UIG / Bridgeman Images

Le Bon Marché, qu’Émile Zola qualifie de « cathédrale du commerce moderne » dans Au Bonheur des Dames, est l’œuvre d’une dynastie d’architectes. En 1872, Louis-Auguste Boileau et son fils Louis-Charles Boileau s’attellent à l’agrandissement du magasin. Gustave Eiffel intervient en tant que consultant dans cette affaire de famille. La structure en fer qui domine le rayon Souliers, par exemple, atteste de la participation de l’illustre ingénieur. En 1915, l’édifice qui abrite l’actuelle Grande Épicerie de Paris est victime d’un incendie ravageur, trois ans après son inauguration. Louis-Hippolyte Boileau, le petit-fils de Louis-Auguste, se charge, en 1923, de sa reconstruction, dans un style Art déco dont il reste des vestiges : un ascenseur côté rue Velpeau, les escaliers qui mènent à l’Espace Enfant, la verrière qui surplombe la Mode femmes…

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Claude et François-Xavier Lalanne, La Rêveuse

Claude et François-Xavier Lalanne, La Rêveuse, 1989

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sculpture et topiaire en pierre de Trani et acier inox dans le jardin du restaurant • 250 cm • Architecte-paysagiste Pascal Cribler • © Le Bon Marché Rive Gauche / © Adagp, Paris 2021

Tout près de ce dernier espace se cache une poule signée César. Quant à La Rêveuse de Claude et François-Xavier Lalanne, première sculpture à avoir rejoint cet écrin historique, elle repose actuellement dans les réserves de l’enseigne avec 20% de la collection. La petite équipe chargée d’enrichir ce fonds, en interne, fait la part belle à la peinture, moins encombrante, et depuis quelques années à la création française. Le parcours n’est ni thématique ni chronologique. L’emplacement des toiles, dispersées aux quatre coins du magasin, dépend des murs disponibles et change deux fois par an.

De nombreuses expositions rythment la programmation, dont les cartes blanches, clin d’œil à un événement commercial initié par Mr Boucicaut autour du blanc, en 1873.

Ouvrez grand les yeux, ou vous risqueriez de manquer un Jean-Michel Alberola, derrière l’une des caisses de la librairie ; ou un Marc Desgrandchamps autour des escalators, au premier. Exposés à la maladresse des passants, les tableaux connaissent toutefois peu d’accidents : « Notre clientèle est très respectueuse de ces surprises, de ces cadeaux que nous tenions à lui offrir », déclare Frédéric Bodenes, directeur artistique du Bon Marché. Un accrochage sans accrocs, donc ; rarement soumis à des restaurations.

De nombreuses expositions temporaires rythment la programmation du Bon Marché, dont les fameuses cartes blanches hivernales, clin d’œil à un événement commercial initié par Mr Boucicaut autour du blanc, en 1873. Le même thème s’impose aujourd’hui aux artistes invités, obligeant certains à travailler pour la première fois cette (non) couleur. C’était le cas de Chiharu Shiota, en 2017. Le restaurant italien Primo Piano, au 2e étage, accueille en ce moment des toiles de Nicolas Chardin, cibles angulaires qui semblent faire écho à l’installation de Nourry. Même quand il organise une manifestation davantage tournée vers la mode ou la musique, le magasin réserve toujours un espace aux plasticiens, « L’entrée sur l’art contemporain », situé à l’angle rue du Bac et rue de Babylone.

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Encore plus discrète, la collection de design mérite autant d’attention. Chaque pièce remplit une fonction précise, se fondant ainsi parfaitement dans le décor. Une banquette de Sergio Rodrigues, imaginée pour l’Auditorium de l’Institut des Architectes du Brésil (1962), occupe désormais le coin « Cireur », au sous-sol. Remarquables par leur système de joints gravitationnels, les trois tables en marbre d’Angelo Mangiarotti, également situées au –1, servent à présenter des vêtements masculins. La première acquisition date de 2012. Il s’agit d’une table de conférence signée Charles et Ray Eames, couple légendaire du design américain. Cet intérêt aigu pour les arts décoratifs remonte à 1923, année où le Bon Marché ouvre l’Atelier Pomone pour fabriquer des meubles sur-mesure… Si ce dernier a disparu dans les années 1950, le goût du Beau lui n’a de toute évidence jamais quitté les lieux.

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Le Bon Marché Rive Gauche

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Visites commentées de « la collection Le Bon Marché Rive Gauche – art contemporain » et de « la collection Le Bon Marché Rive Gauche – mobilier des arts décoratifs »



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