Gamekyo : [TEST] Ghost of Tsushima


Nous sommes en 1274 et l’Empire Mongol, après s’être déjà bien occupé de la Corée, s’apprête à conquérir le Japon en raflant préalablement quelques îles stratégiques sur le chemin, dont celle de Tsushima où résident de nombreux samouraïs qui n’ont pas l’intention de se laisser faire par le premier envahisseur venu et qui vont donc devoir user d’honneur et de bravoure pour sauver leur bout de terre. Le problème c’est que chez les mongoles de Khotun Khan, on a peut être de la bravoure, mais l’honneur, c’est quand même un concept un poil surfait. En résulte un massacre d’entrée de jeu où l’un des rares survivants sera Jin Sakai, désormais prêt à tout pour rassembler les guerriers encore vaillants de Tsushima afin de mettre en place une vengeance digne, même si lui aussi se pose une question normalement insensée quand on a été élevé avec les codes des samouraïs : l’honneur a t-il encore un sens face à des ennemis qui en sont totalement dénués ?

« Nous voilà débarrassés du superflus, on va pouvoir aborder l’essentiel. » Et disons clairement que Ghost of Tsushima est en gros une production Ubisoft avec davantage de budget. Vous connaissez l’expression, et à ceux qui seraient tentés de me hurler dessus, sachez que je n’ai jamais considéré ce terme comme péjoratif, juste que c’est un principe de jeu résolument assez grand public qui peut ou non plaire à chacun donc comprenez dans quoi vous mettez les pieds. Mais c’est quoi un jeu « type » Ubisoft ? Hé bien vous prenez une grande carte découpée en plusieurs zones de grande taille (trois ici), vous y mettez des missions principales à suivre en fil rouge, et des missions secondaires plus ou moins intéressantes mais heureusement suffisamment scénarisées (encore heureux en 2020), avec au milieu des forts à libérer (plein, avec d’autres se rajoutant en cours de route) et même quelques tours… Oh pardon, des phares je voulais dire (moins nombreux). On saupoudre tout cela d’une petite composante RPG qui passe par la mise à niveau d’un arbre de compétences et un peu de craft pour la route, et voilà, vous obtenez plus ou moins le AAA moderne destiné à bien se vendre car remplissant l’essentiel du cahier des charges.

Parce qu’il y a du très chaud mais aussi du tiède dans Ghost of Tsushima. Jamais du mauvais, du moins si l’on excepte les missions de filature qui, bordel, n’ont pas changé depuis Assassin’s Creed premier du nom. C’était déjà chiant en 2007, ça l’est toujours autant en 2020 mais heureusement, elles sont très peu fréquentes mais il suffit d’une seule pour nous faire sérieusement bailler. Donc le chaud et le tiède, c’est ce qui va caractériser une partie de l’aventure et on pourrait même commencer par l’aspect graphique. Ah c’est beau, franchement, et même que ça déboîte la gueule à plus d’un moment, jusqu’à se rendre compte que ce beau tableau demande que de bonnes conditions soient réunies. Un coucher de soleil et de la pluie ? Tellement beau que les larmes coulent. Météo standard ? Ça devient soudainement assez random et ce n’est pas pour rien que ce qui ressort le moins bien sont les intérieurs (qui vont demander quelques réglages coté luminosité d’ailleurs tant on n’y voit rien).

De manière globale, on se dira quand même qu’il y a un excellent travail fait sur la végétation avec des feuilles qui s’envolent dans tous les sens, ce qui est assez essentiel vu que l’un des éléments phares du gameplay sera la quasi-absence d’indicateur à l’écran (quand bien même vous en avez placé un sur la map) pour simplement frotter le pavé tactile qui enclenchera alors une bourrasque vers la direction à prendre. Ce n’est pas grand-chose mais c’est fort joli et le concept fonctionne très bien pour donner l’essentiel tout en épongeant le HUD. Mais bref, pour en revenir au rendu, il faut être honnête en appuyant que c’est vraiment beau et digne d’une fin de génération, et c’est peut être parce que c’est généralement aussi beau que les détails qui foirent ressortent autant. Magnifique par exemple cette petite plage avec nos traces de pas sur le sol mais pourquoi l’eau est aussi bof ? C’est bien aussi d’avoir su renouveler les décors entre les zones (c’est même assez surprenant) mais qu’on m’explique encore aujourd’hui comment se fait-il que dans la forêt de bambous… notre perso passe à travers les bambous, hm ?

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Ça chipote un peu d’accord (les bambous, c’est quand même choquant) mais il faut parler contexte et Ghost of Tsushima, outre le fait qu’il est le dernier AAA Sony Worldwide Studios de l’histoire de la PlayStation 4, il est surtout celui qui a le malheur de passer juste après The Last of Us II et pas de bol pour lui, sur le jeu des détails et de la perfection, c’est difficile de ne pas être taquin sur certains sujets. Allez, passe encore les bambous, mais sur le plan de la mise en scène, c’est le même topo. Alors attention, Ghost of Tsushima reste supérieur à plusieurs AAA du milieu et sait aussi raconter une histoire sympa bien qu’assez simpliste et sans grande surprise (à une ou deux près) mais encore une fois, la concurrence dans la même maison d’édition se fait sentir à peine quelques semaines après. Trop de séquences de blabla se résument à deux persos en caméra éloignée en face à face sans mouvements… Et on ose même rajouter que l’absence de transition cinématique/gameplay (un simple fondu noir bien brutal) est presque surprenant à l’heure où de plus en plus de gros titres jouent cette carte pour accentuer l’immersion.

Tout cela sera dur à entendre mais on répète qu’on est quand même dans du bon level du JV et Ghost of Tsushima a ses atouts pour faire la différence et montrer qu’il y a du boulot derrière, et des choses qui motivent à avancer, au point qu’on ne s’est pas ennuyé durant les 30-35h pour terminer l’histoire, et que je n’ai d’ailleurs même pas rechigné à y retourner pour faire des annexes. Pas encore choppé la Platine mais après tout, pourquoi pas. L’un des points forts du jeu par exemple, c’est l’indéniable montée en puissance de Jin qui est peut être encore plus drastique que dans de nombreux jeu d’action en monde ouvert. Ne vous fiez aucunement aux premiers moments de l’aventure où notre héros sera théoriquement à poil : tout est débloquer, hormis le sabre qui sera d’ailleurs votre seul et unique arme principale (on peut néanmoins l’augmenter en puissance, comme tout le reste).

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Proposant déjà de base un gameplay assez nerveux dans ses déplacements, le titre va peu à peu prendre son envol dans ce qui tient des combats puisqu’au moindre cap débloqué (donc un point de compétence à chaque fois), on prend plaisir à réfléchir quoi apprendre vu qu’il y a un paquet de choses intéressantes : la parade parfaite, la roulade, la possibilité de provoquer en duel plusieurs ennemis à la fois (sorte de QTE, idéal pour éponger un groupe), ralentir davantage le temps en visant… On veut tout ou presque, et c’est loin d’être les seuls éléments d’importance pour Jin et on ne saura que trop vous conseiller, une fois « libre » de vos mouvements passé l’introduction, d’éviter d’aller zieuter à droite/à gauche comme dans la plupart des open-world pour de suite faire vos premières missions principales qui vous octroieront l’arc et des possibilités d’infiltration.

On en apprend toujours un peu au fil de l’aventure même si cela pourra être considéré comme une qualité ou un défaut : oui, de nouvelles choses viennent s’ajouter périodiquement au gameplay mais afin de renouveler constamment les choses, il faudra prendre en compte que certaines arrivent tardivement. Le grappin par exemple, je l’ai obtenu après seulement 15 heures de jeu (en tapant quelques annexes entre deux principales) bien qu’il ne brille pas par son utilité. Et il faut aller encore plus loin pour l’espèce de furie, la seule qui mettra en place les fameux démembrements. Avant cela, pas de tête ou bras coupés, ou alors uniquement et rarement durant une cinématique. Dans tous les cas, l’expérience se fait de plus en plus complète, et c’est là que les quêtes annexes trouvent grande intérêt car si beaucoup ne serviront qu’à gratter un peu de renommée, d’autres offrent de très belles récompenses, comme de nouvelles armures (chacune a ses bonus) et même mieux : l’arc long ou les fléchettes qui rendent fou (énième coucou à Assassin’s Creed), ça passe par les annexes, et on ne veut pas passer à coté.

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Définitivement, Ghost of Tsushima est un bon jeu, juste qu’il n’atteint pas l’excellence d’autres représentants de Sony Worldwide Studios, peut être par un manque d’expérience de Sucker Punch, ou peut être parce que la cible voulue n’imposait pas une grande profondeur. Ça expliquerait pourquoi les combats se veulent Souls-esque sans jamais l’être, où la posture et 2/3 esquives sont suffisantes pour battre tel ou tel ennemi, quand à coté, un vrai 1V1 contre un « boss » donne une toute autre dimension au feeling, surtout si vous poussez la difficulté. De la même façon, le jeu essaye de donner le ton d’une exploration libre sans trop de HUD, mais la moindre séquence de grimpette est d’une linéarité parfaitement égale à ce que Uncharted faisait dans le premier épisode (chose que l’on retrouvait d’ailleurs avec Horizon Zero Dawn). Encore une fois vous y passerez un bon moment, vous y trouverez vos moments de grâce, de bonnes petites idées, des attentions particulières pour éviter la prise de tête (peu de matériaux différents à looter et c’est très bien comme ça) mais il lui manquera ce truc pour atteindre l’aura des plus grands, probablement parce que Sucker Punch n’a pas « osé » aller plus loin.

Note :
Juste un petit mot sur le fait que comme bien d’autres titres, Ghost of Tsushima propose deux types de configuration sur PS4 Pro : un boost de la résolution ou du frame-rate. On a privilégié le deuxième, déjà parce que c’est mieux, mais aussi parce que le ventilateur s’est activé en mode refroidissement nucléaire avec la première option.



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