Blé tendre – Utiliser des grains prégermés pour les semences de ferme ? – Grandes cultures


Dans les secteurs concernés par un temps frais et pluvieux cet été, peut se poser la question d’utiliser des grains avec une qualité dégradée pour les semences de ferme. Selon le syndicat des trieurs à façon français, la réponse est oui, mais sous certaines conditions.

« Depuis début août, la dégradation des conditions climatiques génère des inquiétudes chez les agriculteurs qui n’ont pas pu récolter leurs blés avant la pluie. Certains propagent l’idée que 2023 ne serait pas une année à faire sa semence », note le syndicat des trieurs à façon français (Staff) dans un communiqué du mois d’août. Il rappelle : il ne faut pas confondre « qualité meunière et qualité semencière ». « Si la pluie est néfaste à l’indice de chute d’Hagberg (TCH) et à la valeur boulangère, elle n’altère pas de la même façon la qualité germinative des grains », souligne notamment Richard Meunier, technicien conseil chez EAT Conseil.

« Jusqu’à 18 % de taux d’humidité, il n’y a aucun risque d’altération de la levée du semis, ajoute le Staff. Un blé à maturité dont le taux d’humidité est supérieur aux normes de stockage fait une excellente matière première pour la semence, alors que sa valeur marchande sera dégradée. Il est facile de le vérifier par des tests de valeur germinative comme le rappelle Arvalis en Bretagne le 9 août. »

Qu’en est-il dans le cas de grains germés ?

La dernière année à grains germés remonte en France à 2014. « De mémoire de trieur, il n’y aurait eu que trois années à grains germés depuis 2000. Cette année, seuls les secteurs côtiers du quart Nord-Ouest de la façade maritime sont affectés, sur 5 à 50 km à l’intérieur des terres », note Olivier Hoste, trieur en Normandie. Mais, là encore, il ne faut pas confondre valeur marchande et valeur semencière. « Nos collègues de l’Europe du Nord le savent bien. Que ce soit au Danemark, en Grande-Bretagne, les blés germés sont bien plus fréquents qu’en France et cela ne les empêche pas de faire leurs semences de ferme », indique Sylvain Ducroquet, trieur dans les Hauts-de-France et vice-président de l’association européenne des trieurs de semence (EMSA).

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Pour le Staff, « il convient d’abord de savoir faire la part des choses, entre grains germés et grains trop germés. Quand le germe ne fait que pointer à l’extrémité du grain, les spécialistes parlent alors de point blanc ou de prégermination. Si sa valeur céréalière est déjà altérée, il n’y a aucune dégradation de sa valeur semencière. Mieux, l’expérience du terrain montre plutôt un bénéfice, avec une accélération de la levée au champ. L’usage de la prégermination est ainsi répandu en culture potagère »

Ainsi, « il est possible de faire des semences de ferme les yeux fermés avec des grains prégermés. Dans le cas où le germe a percé l’enveloppe du grain, l’agriculteur doit se poser plusieurs questions » :

– « Quel est le stade de développement du germe ? Une fois que les radicelles apparaissent, il est trop tard. Le blé ne se conservera pas, il dépérira avant le semis. Mais si le germe n’est qu’aux premiers millimètres, ses facultés germinatives seront conservées jusqu’au semis, il reprendra son développement en terre ».

Les stades de germination des grains de blé : 1 – grain sain ; 2 – grain point blanc ; 3 – grain prégermination ; 4 – grain germé 2 mm ; 5 – grain germé 5 mm ; 6 – grain trop germé au stade début développement des radicelles et 7 – grain trop germé avec radicelles développées. ( © Cap Semences)

« Toutefois, les avis se partagent à propos de la longueur de germe à ne pas dépasser : 2 mm pour les plus prudents, 5 mm pour les plus joueurs. Il convient aussi de faire la distinction entre les variétés, certaines sont plus sujettes à la germination au champ que d’autres ».

– « Jusqu’à quelle proportion de blé trop germé peut-on faire de la semence ? Arvalis rappelait que la valeur de référence du taux de germination des semences est de 95 % mais qu’une valeur dégradée de 85 % est tolérée pour les céréales à condition que cette moindre performance soit indiquée sur les sacs par une étiquette bleue pour permettre à l’agriculteur de corriger la densité de semis. Ces valeurs de germination sont calculées en sortie, mais pas en entrée ».

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Le Staff, confiant pour les semences 2023

« La question du moment est de savoir où se situe la limite en deçà de laquelle il est déconseillé de faire de la semence de ferme. » Les trieurs ​​​professionnels du Staff ont mis au point la méthode dite du « triage sévère ». Elle permet de « retirer au moins 50 % des grains indésirables ». Ainsi, en partant de lots plus « sales », ils peuvent atteindre les niveaux de qualité des semences commerciales.

« Même en 2023, les semences de ferme atteindront très majoritairement le niveau de qualité supérieure avec des valeurs germinatives au-dessus de 95 %, assure le Staff. Et il n’y a aucun doute sur la capacité de la profession à assurer pour au moins 99 % de sa clientèle des semences de qualité intermédiaire avec une valeur germinative comprise entre 85 % et 95 %. Nous saurons aussi dans ce cas alerter nos clients sur la nécessité d’adapter le taux de densité de semis. »

En Belgique, « nous sommes également touchés par le phénomène, précise Thibault Van Halle, délégué commercial chez Deronne, à Lessines dans le Hainaut. Mais ma crainte aujourd’hui n’est pas de ne pas pouvoir trier la semence de ferme mais de manquer de semences commerciales. Si les agriculteurs sont trop nombreux à prendre peur, ils pourraient bien manquer d’approvisionnement, surtout pour les nouvelles variétés », estime le délégué commercial belge qui rappelle également que les semences commerciales ne sont pas épargnées par le phénomène. « Elles ne poussent pas en usine, mais dans les champs… ».

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