Les récoltes de blé tendre débutent en Europe, entre promesses d’une moisson fantastique en Russie et rendements inégaux en France, avec des conditions plutôt favorables aux États-Unis : les flux s’accélèrent et la météo redevient la boussole des marchés.
Les cours du blé et du maïs, en nette baisse depuis la mi-juin, ont rebondi mardi pour différentes raisons, selon une analyse du cabinet Agritel : à la Bourse de Chicago, le marché se rééquilibrait après d’importantes ventes et avant un nouveau rapport du ministère américain de l’Agriculture (USDA) qui devrait acter une « hausse des surfaces de maïs au détriment du soja » aux États-Unis.
Sur Euronext, le rebond était aussi dû à un retour de certains acheteurs sur le marché, comme l’Algérie, qui aurait acheté une énorme cargaison (740 000 tonnes de blé), et la Tunisie (100 000 tonnes de blé et 50 000 d’orge). Le Pakistan a lancé un appel d’offres pour 500 000 tonnes de blé meunier.
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— ??????????????™? (@RussianGrainTra) June 29, 2022
Retour de la Chine
Autre facteur clé, la levée des restrictions sanitaires en Chine : « L’essentiel des flux entrant sur le marché des matières premières sont déterminés par des algorithmes, qui lisent les titres (des sites d’information) et les signaux techniques (seuils ou mouvements). Et des titres qui disent que la Chine, qui est le premier importateur mondial de matières premières, est en train de se rouvrir, ça ne peut être que positif (pour les prix) », a expliqué Arlan Suderman, de la plateforme StoneX.
La « correction » est-elle terminée ? Sur le marché américain, « Cela va beaucoup dépendre du reste de l’été, particulièrement les prochaines semaines pour le maïs, parce que la pollinisation démarre », indique Jack Scoville de Price Futures group.
« Tout le monde parle d’une possible récession et tout le monde a ça en tête, parce que les prix des grains sont vraiment élevés », malgré la correction, souligne-t-il.
L’orientation à la baisse des semaines précédentes s’expliquait par un cocktail mêlant « amélioration des conditions climatiques », « situation relativement figée en Ukraine » et « crainte grandissante d’une récession » : des facteurs qui sont « toujours présents », renchérit Edward de Saint-Denis, courtier chez Plantureux & associés.
Moissons
Dans les grandes plaines européennes, les récoltes de blé démarrent. En France, premier producteur européen de blé tendre, la récolte s’annonce correcte en volume mais inégale en qualité, plusieurs régions ayant été touchées par des épisodes de grêle ou de fortes chaleurs en pleine période de remplissage des grains.
En Russie, la moisson s’annonce record avec des prévisions affichées à 88 millions de tonnes, contre environ 75 millions l’an dernier.
Mais de nombreux opérateurs restent réticents à engager des bateaux sur la mer Noire et le rouble est au « plus haut depuis sept ans », conséquence de l’obligation de traiter en roubles les transactions. Pour favoriser ses exportations, Moscou est en train de revoir son mode de calcul de taxes à l’export (actuellement à 146 dollars la tonne en blé), selon Agritel.
« Système de troc »
À la faveur de la reprise des achats sur les marchés, de nouvelles logiques de flux apparaissent. La Russie s’est engagée lundi à garantir au Brésil « un approvisionnement ininterrompu » d’engrais, primordial pour la puissante industrie agroalimentaire brésilienne qui importe 80 % de sa consommation d’engrais, dont un quart de Russie.
Presidents Bolsonaro of Brazil and Putin of russia talked on the phone on Monday about the BRICS Summit and fertilizers and food security issues. The call was announced by Mr. Putin foreign policy adviser and confirmed by Kremlin’s official website: https://t.co/SRNOYxe5yg
— Smoke Signal | Socio-Environmental Monitor (@SmokeSignalBR) June 28, 2022
« Est-ce qu’il s’agit de trouver un accord de libre-échange, incluant par exemple de l’éthanol brésilien, ou le signe d’une volonté d’orienter les flux de matières premières agricoles vers des pays potentiellement alliés comme la Chine ? », s’interroge Edward de Saint-Denis.
« L’Égypte, de son côté, a acheté du blé indien et s’est engagée à fournir des engrais à New Delhi. Cet accord, d’État à État, s’apparente à un système de troc. Et propose une réponse à l’insolvabilité de certains États », relève-t-il.