Avec Jaffna, marche ou rêve

Et la couleur fut ! Dans un monde morose, conformiste et sans saveur, deux personnages colorés, alter egos de Bravin et Stan qui composent le duo de musiciens Jaffna, vont à contre-courant. Au rythme de « Roots », morceau de deep-house aérien aux accents sri-lankais – tout comme leur nom, qui renvoie à un royaume tamoul mythique –, ils combattent orage et tempête pour emporter dans leur marche audacieuse une petite foule bien disciplinée. Rien ne les arrête, ni la solitude ni les balles qui les heurtent. Si bien que l’univers monochrome qui les entoure se pare de couleurs ; les hommes trop terre-à-terre se voient pousser des ailes, métamorphosés en méduse ou en carpe. Triomphante apothéose : les deux silhouettes se télescopent et fusionnent dans un élan de gaieté exalté. Jaffna est né.

C’est à Pauline Bricourt, réalisatrice avec laquelle Jaffna avait déjà collaboré pour le clip de leur EP Oslo, que l’on doit cette traversée onirique. Elle y inscrit en filigrane ses sujets de prédilection tels que le conditionnement face à la liberté. Et file, par la même occasion, la métaphore d’une rencontre : celle de deux nomades solitaires au cœur rempli d’espoir que le destin réunit. Un mélange subtil de poésie et de fougue, qui ne manque pas de nous faire chavirer.