6 chefs-d’œuvre à (re)découvrir au Musée départemental Arles antique


1. Un captif pas si impressionné

Occupé dès la fin du Néolithique, le territoire d’Arles a accueilli les premières fondations de la ville au VIe siècle av. J.-C. Sa position au bord du Rhône est idéale pour le commerce et attire les Grecs. En 46 av. J.-C., Jules César accorde à la cité le statut de colonie de droit romain. Un théâtre, un forum et un cirque y sont entre autres créés. Cette statue en bronze en est l’un des plus beaux vestiges. Elle a probablement appartenu à un groupe statuaire décorant l’un des monuments de la ville ; ses légers défauts de proportion (une jambe plus courte que l’autre, des pieds trop longs) pourraient avoir été volontaires afin de créer un effet d’optique. Notons que l’homme, bien que captif donc ennemi des Romains, n’est pas représenté humilié, mais fier et résistant – de fait, cela honore encore davantage son adversaire !

Statue de captif, découvert durant les fouilles du Rhône, 2007

Statue de captif, découvert durant les fouilles du Rhône, 2007, dernier quart du Ier siècle av. J.-C.

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Bronze • 63,5 × 28 × 44,5 cm • Dépôt du Drassm MDAA © J.-L. Maby

2. Un colosse pour le théâtre

La fonction d’empereur ne va pas sans codes de représentation. Si on imagine difficilement aujourd’hui un président de la République montré à demi nu, il était courant de présenter Auguste en semi-nudité héroïque, afin de proclamer sa supériorité et ses qualités divines. Cette statue en marbre de Carrare faisait partie du décor du théâtre antique, et ornait la niche centrale du mur de scène. Installé sur les hauteurs de la ville, le monument affirmait la toute-puissance politique de Rome ; c’est pourquoi il était abondamment décoré, et c’est aussi pourquoi l’effigie d’Auguste mesurait initialement… trois mètres de haut !

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Statue colossale d’Auguste découverte dans le théâtre antique, 1750 (torse) et 1834 (tête et drapé)

Statue colossale d’Auguste découverte dans le théâtre antique, 1750 (torse) et 1834 (tête et drapé), 12 – 10 av. J.-C.

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Marbre de Carrare • 108 × 78 × 65 cm • Dépôt du musée du Louvre (torse) MDAA © J.-L. Maby et R. Bénali

3. Une épave de 31 mètres de long

Les fonds du Rhône ont révélé aux archéologues toute l’importance commerciale d’Arles : amphores, lingots, vaisselle… Ce bateau, presque intact malgré son naufrage, est l’un des témoignages les plus importants du trafic maritime qui reliait Arles à la Méditerranée. Découvert en 2003 à la faveur d’une crue centennale, l’épave contenait son mobilier et toute sa cargaison (!), soit des pierres de construction provenant des carrières de Saint-Gabriel. Le chaland a probablement été bâti dans les chantiers navals d’Arles dans les années 50 ou 60 de notre ère. Le fond du bateau est fait en chêne : un bois très résistant qui peut supporter d’importantes charges ; ses flancs sont quant à eux constitués de résineux et allègent la longue embarcation. Un porte-bonheur (pas si efficace !) a été découvert à la proue du bateau : une monnaie votive qui devait lui apporter chance et prospérité…

Le chaland, épave découverte en 2003 et relevée en 2011

Le chaland, épave découverte en 2003 et relevée en 2011, 50 – 60

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Bois de chêne et de résineux, tissu, poix, fer • 379 × 3112 × 290 cm • MDAA © R. Bénali

4. Les outils des artisans antiques

Les artisans occupaient une place de choix dans la société antique. De nombreux objets des collections en témoignent : sarcophages sculptés, canalisations en ferronnerie, vases ornés… Ce bas-relief en calcaire date du IIe-IIIe siècle et réunit la représentation de différents outils, dont un compas, un ciseau, une herminette, un niveau avec équerre et fil à plomb et un maillet. Il a été retrouvé au sein d’un monument funéraire, où il avait sans doute la fonction de linteau (c’est-à-dire placé juste au-dessus de la porte). La personne enterrée dans le tombeau était probablement un artisan travaillant le bois ou la pierre : il était alors très courant de trouver sur les tombes des indices concernant le métier des défunts (des amphores pour un marchand de vin, des meules et un four pour un boulanger, des cercles et des douelles pour un tonnelier…).

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Bas-relief des outils de l’artisan découvert à Saint-Honorat-des-Alyscamps

Bas-relief des outils de l’artisan découvert à Saint-Honorat-des-Alyscamps, IIe – IIIe siècle

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Calcaire • 22 × 91 × 33,5 cm • MDAA © R. Bénali

5. Les astuces déco d’une villa romaine

La vie quotidienne des Romains est également abordée dans le parcours du musée, avec notamment quelques objets de décoration – dont cette superbe mosaïque découverte au début des années 80 sur la rive droite de la ville. Elle appartenait à une villa urbaine (« domus ») et ornait le sol d’une immense salle à manger de 56 mètres carrés. Autour des motifs figuratifs, un décor géométrique noir et blanc signale l’emplacement des lits sur lesquels mangeaient les hôtes et leurs invités, à moitié allongés. Aux quatre coins du carré, des Amours incarnent les différentes saisons. Regardez bien : vous croiserez des néréides, des chevaux, Dionysos ivre soutenu par un jeune bacchant, un satyre, une panthère… Au centre, Aiôn (personnification du temps) tient dans sa main gauche un sceptre, symbole de pouvoir, et dans sa main droite la roue du zodiaque.

Mosaïque d’Aiôn découverte lors des fouilles de la Verrerie de Trinquetaille, sol de la pièce X, 1983 et 1992

Mosaïque d’Aiôn découverte lors des fouilles de la Verrerie de Trinquetaille, sol de la pièce X, 1983 et 1992, fin du IIe – début du IIIe siècle

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Opus tessellatum polychrome : marbre, calcaire, verre • 771 × 753 × 5,5 cm • MDAA © R. Bénali

6. Un sarcophage amoureux

Ils se sont endormis pour toujours côte à côte : le couple inhumé dans ce sarcophage appartenait aux hautes couches de la société arlésienne du IVe siècle de notre ère. L’homme et la femme sont représentés dans un médaillon au centre du décor, se regardant et se touchant affectueusement. Lui tient dans sa main un parchemin, symbole de sa connaissance de la loi divine. Ils sont entourés d’un décor riche de dizaines de personnages, issus de 16 scènes de l’Ancien et du Nouveau Testament. Ce sarcophage est symptomatique d’un changement majeur dans la vie arlésienne : le culte chrétien est officiellement autorisé depuis l’an 313, grâce à l’empereur Constantin. Arles entre alors dans une nouvelle ère… Et c’est la fin du parcours. À conclure par une promenade dans le joli jardin du musée, imaginé d’après un texte de Pline le Jeune et organisé à la façon d’un cirque romain !

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Sarcophage dit « de la Trinité » ou « des Époux » découvert dans un fossé près du site des Papeteries de Trinque en 1974

Sarcophage dit « de la Trinité » ou « des Époux » découvert dans un fossé près du site des Papeteries de Trinque en 1974, deuxième quart du IVe siècle

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Marbre • 103 × 205 × 111 cm • MDAA © J.-L. Maby et L. Roux

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Musée départemental Arles antique



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