Sur la route des chefs-d’œuvre de l’Art déco dans les Hauts-de-France


1. À Saint-Quentin, une mairie qui nous fait voyager dans le temps

Pour une salle du Conseil municipal aussi belle, on s’engagerait volontiers en politique. De l’extérieur, l’hôtel de ville de Saint-Quentin a tout d’un édifice gothique – de fait, sa construction a débuté au XIVe siècle, et la restauration après sa destruction durant la Première Guerre mondiale a respecté son style d’origine. Pourtant, à l’intérieur, l’étage nous transporte directement dans les années 20 ! Confiée à l’architecte Louis Guindez, la salle du Conseil est une merveille de lambris en bois, décorée de bas-reliefs signés Émile Boussu représentant différents corps de métier. Tout est d’origine : les lampes, les fauteuils de la maison Jeanselme, le garde-corps en fer forgé de la mezzanine… Autre beauté de Saint-Quentin : le buffet de la gare, où l’on se prend à rêver qu’un jour, un restaurateur inspiré reprendra ce décor chatoyant pensé dans ses moindres détails par le verrier et mosaïste Auguste Labouret. Enfin, ne manquez pas le Palais de l’Art déco, édifice majeur du centre-ville, qui accueille régulièrement des événements mais mériterait un petit coup de neuf.

Sylvère Laville, Palais de l’Art déco, Saint-Quentin

Sylvère Laville, Palais de l’Art déco, Saint-Quentin, 1922–1927

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Dans le cadre du Printemps de l’Art déco, des visites (gratuites, sur réservation) sont organisées :

Pour la salle du Conseil municipal, rendez-vous le vendredi 27 mai à 20h.

Pour le Buffet de la gare, rendez-vous le dimanche 15 mai à 10h30 pour un petit-déjeuner, le mercredi 18 mai à 16h30 pour un goûter, et le samedi 28 mai à 16h30 pour un goûter.

Pour le Palais de l’Art déco, rendez-vous les samedi 14 et 21 mai à 10h30.

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Hôtel de Ville de Saint-Quentin

2. À Chauny, de villas en fresques peintes

Ouvrez grands vos yeux : à Chauny, première ville de France à avoir bénéficié d’un plan d’embellissement après la guerre, de nombreux bâtiments présentent de jolies façades Art déco, qui fractionnent notre balade en mille petites pauses dédiées à la contemplation de mosaïques et d’enseignes rétros, de la Poste à la Pâtisserie du Marché couvert. L’Hôtel de ville mérite, ici aussi, le coup d’œil : n’hésitez pas à entrer dans cet édifice public doté d’un sublime vitrail en motifs géométriques dans l’escalier principal. Les mariés auront la chance de s’unir dans une superbe salle à l’étage, aux lustres à perles inspirés du décorateur Jacques-Émile Ruhlmann. À deux pas de là, une maison fait la fierté des habitants : dessinée par Louis Rey, auteur du plan de la ville pour la reconstruction, l’immense villa Le Révérend vient d’être vendue à un particulier mais s’admire de l’extérieur pour ses luxueux volumes. Terminez votre balade par les églises, notamment Notre-Dame, où il faut regarder les fresques peintes par Louis Mazetier et l’unique vitrail (celui du transept nord) subsistant de son travail dans l’entre-deux-guerres, pour comprendre l’application de l’Art déco à un édifice religieux.

Hôtel de ville / Louis Mazetier, Fresque peinte de l’église Notre-Dame, Chauny

Hôtel de ville / Louis Mazetier, Fresque peinte de l’église Notre-Dame, Chauny

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© Jérôme Halâtre / © Eric Boutigny

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Église Notre-Dame de Chauny

Ouverte les samedis 4 juin, 2 juillet, 6 août, 3 septembre 2022.

3. L’incontournable piscine de Bruay-la-Buissière

Côté piscines, le Nord a de la chance : il y a, bien sûr, le musée de La Piscine à Roubaix, écrin hallucinant signé de l’architecte lillois Albert Baert, dont l’immense vitrail en coucher de soleil ne nous lasse pas. À ce chef-d’œuvre de l’Art déco s’en ajoute un autre, qui a l’avantage d’être toujours en activité. Et puisqu’il fait beau, c’est en maillot qu’on visitera la pépite de Bruay-la-Buissière ! Ouverte en 1936, année des congés payés, celle-ci a été conçue par l’architecte Paul Hanote pour permettre aux mineurs de se détendre et de faire du sport dans un cadre hygiéniste – une révolution à une époque où très peu de logements disposaient d’une salle de bains. Comme à Roubaix, les cabines s’organisent en ligne, tout autour du grand bassin. La rigueur géométrique de l’ensemble, rythmé par les gradins et les longs plongeoirs, est égayée par quelques carreaux de couleurs… De quoi défier le cliché du Nord grisonnant !

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Paul Hanote, Piscine Art déco de Bruay-la-Buissière

Paul Hanote, Piscine Art déco de Bruay-la-Buissière, 1936

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Piscine Art déco de Bruay-la-Buissière

4. À Lens, l’histoire minière en un bâtiment

Après la détente, retour au bureau. Plus exactement, aux Grands Bureaux de la Société des Mines de Lens. Cet imposant édifice Art déco accueille actuellement une faculté de sciences, et laisse entrevoir un peu du prestige que revendiquait jusqu’au milieu du XXe siècle les mines de Lens (les plus importantes du bassin minier du Nord). L’architecte ? Louis-Marie Cordonnier, auteur de l’opéra de Lille, de nombreux hôtels de ville et d’importants édifices religieux de la région, comme la basilique Sainte-Thérèse de Lisieux. Bref, un cador qui s’est employé dans les années 20 à redonner aux mines des bureaux plus grands et plus prestigieux que ceux récemment détruits. En façade, la brique domine sur le béton armé, rappel du décor emblématique du Nord. À l’intérieur, on reste ébahi devant la taille des salles, immenses, et leurs matériaux nobles, du parquet Versailles aux cheminées en marbre. On s’attarde aussi sur les motifs dépouillés des rampes en fer forgé, sur le vitrail de l’escalier d’honneur pensé par le Lillois Pierre Turpin et sur les plafonds à caissons… Quant au mobilier, il est signé des maîtres de l’Art nouveau, Daum ou Majorelle. Très, très chic.

Pierre Turpin, maître-verrier lillois, Vitrail Art déco des Grands bureaux de la Société des Mines, Lens

Pierre Turpin, maître-verrier lillois, Vitrail Art déco des Grands bureaux de la Société des Mines, Lens, 1930

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5. Sur les traces d’Alfred Janniot, un Français à New York

Alfred Janniot, Les Trois Grâces et la rencontre de l’Amérique et de l’Europe

Alfred Janniot, Les Trois Grâces et la rencontre de l’Amérique et de l’Europe, 1934

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Bas-relief • Rockefeller Center, New York

Terminons notre découverte de l’Art déco dans les Hauts-de-France par une exposition au musée des Beaux-Arts Antoine Lécuyer de Saint-Quentin. Soit une seule salle, mais bien faite et scénographiée avec soin pour donner un aperçu en quelques sculptures et œuvres préparatoires du travail d’Alfred Janniot (1889–1969). Né à Paris, élève des Beaux-Arts, Janniot obtient le Prix de Rome de sculpture en 1919 et participe en 1925 à l’Exposition des Arts décoratifs, se faisant remarquer grâce à un grand bas-relief sur la façade de l’actuel Palais de la Porte dorée. Son chef-d’œuvre ? Les Trois Grâces et la rencontre de l’Amérique et de l’Europe, ornant fièrement le Rockefeller Center à New York depuis 1934.

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Alfred-Auguste Janniot, de l’atelier au monumental

Du 1 avril 2022 au 18 septembre 2022

www.printempsartdeco.fr



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