Nucléaire, culture, espace… Ce qu’il faut retenir du plan «France 2030» présenté par Emmanuel Macron


Ce plan d’investissement de 30 milliards d’euros doit permettre à la France de «retrouver le chemin de l’indépendance». Le président de la République a détaillé 10 objectifs.

Top départ pour «France 2030». Ce mardi, Emmanuel Macron a présenté pendant près de deux heures le détail de son plan d’investissement de 30 milliards d’euros visant à «retrouver le chemin de l’indépendance de la France et de l’Union européenne», et «répondre aux grands défis de notre temps».

Le président de la République a d’abord évoqué les grands défis qui attendent la France dans les années à venir. Le défi climatique, qui «change nos moyens de produire et de consommer » et doit nous conduire selon lui à « repenser nos modes d’alimentation collective ». Le défi démographique, avec l’augmentation du nombre d’habitants sur la planète. « Nos sociétés sont confrontées à un vieillissement démographique » et aussi « à la pression des grandes migrations », a précisé le chef de l’État. Puis, le défi des inégalités, accéléré par le « dérèglement de l’économie mondiale ». « La crise que nous venons de vivre a conforté ces grands défis », estime Emmanuel Macron.

Selon le chef de l’État, ces investissements doivent permettre de pallier les faiblesses du modèle français. Parmi elles, «un sous-investissement dans la recherche. Nous avons beaucoup désinvesti», a ainsi déploré le président de la République, avant d’ajouter qu’en outre, «nous travaillons moins que les autres [pays] en cumulé. Cela reste vrai […] Si on veut continuer à réparer les inégalités, il nous faut produire davantage» ajoute-t-il.

Pour autant, Emmanuel Macron ne «croit pas» que ces faiblesses puissent être comblées en amoindrissant le modèle social français. «Il faut améliorer l’efficacité de la dépense sociale» estime-t-il, et «faire les réformes pour produire plus et retrouve le fil du couple ‘innover-produire’ ». L’objectif étant de résoudre le problème posé par un triple déficit français: «le déficit de croissance potentielle, le déficit public et le déficit du commerce extérieur».

L’objectif de France 2030 est, selon Emmanuel Macron, de jeter les bases pour construire un «cycle vertueux». «Il faut maintenant porter une stratégie qui permet d’innover, produire, exporter, et ainsi financer notre modèle social», fait valoir le président de la République, qui tempère cependant : «je ne dis pas que nous allons être leader dans tous les domaines, car nous sommes dans une compétition ouverte. Mais nous devons chercher dans quels secteurs nous pouvons être en tête». Emmanuel Macron estime, en outre, qu’il existe des secteurs dans lesquels la France a pris du retard, ce qui constitue «une menace», mais «on ne peut les abandonner»

Pour cela, le président de la République a énoncé 10 objectifs :

Investir 1 milliard d’euros dans le nucléaire

Alors que l’avenir du nucléaire devient une question clé de l’élection présidentielle de 2022, Emmanuel Macron s’inscrit clairement en faveur de l’atome. «200.000 Françaises et Français travaillent dans le nucléaire, c’est une chance», selon le président de la République. «Nous devons réinvestir pour être à la pointe des innovations de rupture dans le secteur» estime-t-il, en citant notamment le développement des «petits réacteurs» (Small modular reactors, ou SMR). EDF doit mettre sur le marché son propre modèle d’ici 2030.

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Emmanuel Macron veut aussi voir développées les «technologies pour réduire les déchets». «Nous sommes prêts à y investir 1 milliard d’euros d’ici 2030 pour accélérer», annonce le président. «Nous avons absolument besoin de cette technologie, en améliorant la sûreté, en baissant les coûts et en diminuant les déchets»

Devenir le leader de l’hydrogène vert en 2030

C’est l’un des grands enjeux du plan France 2030 : profitant de sa recherche, de son tissu de start-up, de ses géants industriels comme Air Liquide et de son importante production d’électricité décarbonnée grâce au nucléaire, l’Hexagone doit « devenir le leader de l’hydrogène vert en 2030 », a annoncé Emmanuel Macron. « Cela fait partie des secteurs où nous pouvons être leader », a-t-il martelé, appelant à investir « massivement » dans cette filière. Concrètement, d’ici 2030, la France « doit pouvoir compter sur son sol au moins deux gigafactory d’électrolyseurs et produira massivement de l’hydrogène et l’ensemble des technologies utiles à son utilisation », a ajouté le président de la République.

Accélérer la décarbonation de l’industrie

L’un des enjeux de la transition écologique sera de diminuer les émissions de gaz à effet de serre du secteur de l’industrie. «Entre 2015 et 2035 nous devons baisser de 35% les émissions de gaz à effet de serre du secteur. C’est une révolution. Mais nous ne sommes qu’à 4%», a prévenu Emmanuel Macron. «Nous devons accélérer sur la décarbonation. C’est extrêmement onéreux pour tous les sites industriels, puisqu’il faut compter plusieurs centaines de milliers d’euros par site», a précisé le président, qui annonce qu’au total, les trois premiers objectifs – qui concernent la réduction des émissions et le financement du mix énergétique – seront abondés à hauteur de 8 milliards d’euros.

Produire 2 millions de véhicules électriques et hybrides

Autre ambition du président de la République : la production de deux millions de véhicules électriques et hybrides d’ici 2030. Pour que les véhicules polluants soient petit à petit remplacés par de nouvelles voitures qui polluent moins, Emmanuel Macron souhaite s’appuyer sur une « stratégie industrielle ». « Nous ne voulons pas devenir la nation qui roule le plus vert avec des véhicules pas produits chez nous », justifie Emmanuel Macron. Les grands constructeurs doivent donc coopérer pour que cet objectif puisse être tenu. « S’ils ne jouent pas le jeu, nous ne réussirons pas », estime le chef de l’État, qui juge « tenable » cette ambition.

Produire à l’horizon 2030 le premier avion bas carbone

Toujours dans la thématique des transports, l’Hexagone doit voir émerger le premier avion bas carbone «à l’horizon 2030». «Les meilleurs experts m’ont dit : jamais en 2035. Mais […] je suis à mon avis beaucoup trop pessimiste, à dire 2030», a voulu croire Emmanuel Macron. Ce combat devra être «européanisé au maximum», a-t-il précisé, mais l’aéronautique, comme l’automobile, sont «au cœur de l’avenir industriel français». Des investissements massifs dans ces deux «acteurs des transports du futur» sont prévus, de l’ordre de «près de quatre milliards d’euros», a annoncé le président de la République.

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Accélérer la robotisation et la numérisation de l’agriculture

2 milliards d’euros seront consacrés au secteur de l’agriculture afin de la rendre plus compétitive. Ces investissements auront pour but de développer les technologies «du numérique, de la robotique et de la génétique», a annoncé Emmanuel Macron. «Cela passe par des technologies de rupture, par exemple avec la robotique qui permettra d’améliorer la qualité de vie [des producteurs] et de réduire l’usage de pesticides», illustre-t-il. L’objectif est ainsi de répondre à plusieurs enjeux: produire de manière «saine, durable et traçable», c’est-à-dire en produisant davantage tout en décarbonant l’agriculture. Le président de la République entend également «remettre de la valeur de l’agriculture» en permettant aux agriculteurs d’être «payés pour ce qu’ils font»

Avoir 20 bio-médicaments contre le cancer et créer les dispositifs médicaux de demain

Emmanuel Macron a apporté quelques précisions sur le plan santé annoncé il y a quelques semaines. Il a rappelé que 7,5 milliards d’euros seraient investis dans le domaine de la santé, afin de « retrouver la tête sur une médecine prédictive innovante ». Il a appelé à une révolution médicale qui se fera selon lui sur la convergence entre les innovations de rupture avec l’intelligence artificielle. « Notre objectif est d’avoir au moins 20 bio-médicaments contre le cancer, les maladies émergentes et les maladies chroniques et de créer les dispositifs médicaux de demain », a détaillé le chef de l’État.

Remettre la France « en tête de la protection des contenus culturels et créatifs »

Face auxtitans américains comme Amazon et Netflix, la France doit défendre son « imaginaire ». Dans cette bataille culturelle, l’Hexagone doit mettre en avant ses créations, son histoire, ses valeurs, a argumenté Emmanuel Macron. Un combat « à la fois civilisationnel et créateur de valeur », a-t-il noté. L’exécutif veut donc « déployer, avec les acteurs, une stratégie d’investissement massive », d’abord dans la formation de professionnels comme des scénaristes ou techniciens, ensuite dans la construction de « grands studios » utiles pour les acteurs de l’audiovisuel. « Nous devons stimuler les investissements privés pour créer des synergies », a martelé le locataire de l’Élysée, afin de mieux préparer l’Hexagone à la « compétition pour créer l’imaginaire français et européen de demain ».

Réinvestir la conquête spatiale

Alors que l’espace est devenu le terrain de conquête de nouvelles puissances et d’entreprises privées, comme SpaceX, Emmanuel Macron espère voir la France «prendre part à l’aventure spatiale». «Un new space est en train de se construire», estime-t-il. «Le monde que l’on pensait impossible est en train d’arriver beaucoup plus vite qu’on ne le pensait». Le chef de l’État veut ainsi épauler l’industrie française dans le développement de mini-lanceurs réutilisables ou de micro-satellites.

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Explorer les fonds marins

Le président de la République estime qu’il y a également des « innovations de rupture » à mener en assumant un « investissement dans le champ des grands fonds marins ». Il a précisé qu’il n’était pas question d’exploiter ces fonds mais plutôt de les explorer. « Qui peut accepter que nous laissions dans l’inconnue la plus complète une part si importante du globe », justifie-t-il. Selon lui, l’exploration des fonds marins est un « levier extraordinaire de compréhension du vivant ». Elle permettrait également d’accéder à certains « métaux rares », de comprendre le fonctionnement de nouveaux écosystèmes et d’innover en terme de santé.

«Près de 6 milliards d’euros» d’investissements dans les composants électroniques

Pour accomplir ces objectifs, le président de la République a détaillé plusieurs conditions : sécuriser les matières premières, dont les composants physiques et électroniques – des investissements de «près de 6 milliards d’euros» ont été annoncés dans ce domaine pour “doubler” la production électronique d’ici 2030 et «sécuriser» l’approvisionnement en puces -, aller «plus loin» dans le cloud, investir sur les «talents» en améliorant la formation, et se doter d’une stratégie d’investissement en capital pour faciliter le financement des innovations.

Pour conclure, le président de la République a précisé qu’il souhaitait que ce plan soit davantage construit avec l’Europe. Une collaboration qu’Emmanuel Macron dit avoir déjà entamé ces derniers mois avec Angela Merkel et qu’il souhaite poursuivre. «Il y aura des éléments de compétition mais nous devons au maximum créer de synergies», précise-t-il, ajoutant que les premières mesures seront mises en place à partir du 1er janvier 2022.

Ce plan, doté de 30 milliards d’euros, représente une dépense importante pour la France. Mais Emmanuel Macron « assume totalement » ce poids financier a-t-il indiqué dans son discours introductif, y voyant des dépenses indispensables et prometteuses pour l’avenir : « si nous ne prenons pas ce virage, nous continuerons de dégrader nos déficits extérieurs, de créer trop peu d’emplois et d’opportunités pour nos jeunes. J’assume totalement un pays qui investit dans la création de nouvelles filières […] pour dépenser moins dans l’assurance-chômage et la réparation des destins », a déclaré le président de la République.



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