Mort de Michel Piccoli : les 5 films incontournables de sa carrière – Actus Ciné


Décédé le 12 mai dernier à 94 ans, Michel Piccoli était un monument du cinéma français, laissant derrière lui 176 longs-métrages, 49 pièces de théâtre et 33 courts-métrages. Voici cinq films que l’on vous recommande pour découvrir cet immense acteur.

JACOVIDES-BORDE-MOREAU / BESTIMAGE

Acteur de légende du cinéma français, sans doute le dernier représentant de sa génération, l’immense comédien Michel Piccoli nous a quitté le 12 mai dernier, à l’âge de 94 ans. Dans un livre d’entretiens avec son ami Gilles Jacob (J’ai vécu dans mes rêves), il confiait, à plus de 90 ans, son angoisse de ne plus pouvoir travailler: “On voudrait que ça ne s’arrête jamais et cela va s’arrêter (…) c’est très difficile” disait-il. Il laisse derrière lui une impressionnante filmographie forte de 176 longs métrages, 49 pièces de théâtres jouées, et 33 courts.

Voici cinq oeuvres à découvrir du regretté comédien.

Journal d’une femme de chambre (1964)

Issu d’une famille catholique pratiquante, Michel Piccoli devint athée à la suite d’un deuil familial. Sa rupture avec l’Eglise est consommée quand il rencontre, en 1956, le réalisateur d’origine espagnole, naturalisé mexicain, Luis Buñuel, connu pour son anticléricalisme radical. Le comédien lui restera très fidèle : ils feront ainsi sept films ensemble. Le Journal d’une femme de chambre est leur seconde collaboration de la période française de Buñuel, et film réputé le moins énigmatique, sinon le plus accessible, d’entre eux. Adaptation (libre) du roman éponyme d’Octave Mirbeau paru en 1900, l’oeuvre met en scène les heurs et malheurs de Célestine, une jeune femme de chambre de 32 ans (Jeanne Moreau dans un de ses plus grands rôles), arrivant de Paris dans un vaste château en Normandie, pour entrer au service d’une famille de notables aux moeurs et habitudes bien particulières… Porté par son goût pour la dérision et l’envie de s’affranchir d’une certaine image classique, Piccoli a pu interpréter pour Bunuel des rôles libérateurs et souvent jubilatoire. Dans un rôle de composition génial, il incarne ici un mari délaissé par la maîtresse de maison, une femme hautaine et dédaigneuse avec ses domestiques. C’est un bourgeois frustré et libidineux, logiquement gagné par une fièvre pulsionnelle lorsque la belle Célestine débarque dans cette demeure où se morfondent les perversions des uns et des autres.

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Le Mépris (1963)

Les années 1960 marquent le début de la reconnaissance pour le comédien. En 1963, le couple mythique qu’il forme aux cotés de Brigitte Bardot (qui trouve là sans doute le meilleur rôle de sa carrière) dans Le Mépris de Jean-Luc Godard, crève l’écran. Dans cette adaptation du roman d’Alberto Moravia, il incarne Paul javal, scénariste de profession, engagé pour travailler sur une adaptation de «L’Odyssée» que doit réaliser Fritz Lang. Mais un incident apparemment anodin avec un producteur va conduire sa femme, Camille, à mépriser profondément son mari… Devant la caméra du fidèle et grand chef op’ Raoul Coutard qui filme en cinemascope, et sur l’inoubliable musique de George Delerue, Piccoli incarne un être veule qui révèle ses fêlures dans cette bouleversante entreprise de destruction d’un couple aux allures de tragédie grecque. Classique du cinéma, ce film est d’ailleurs l’une des oeuvres de chevet d’un certain Martin Scorsese. “Pour moi, “Le Mépris” est un des films les plus émouvants de son époque. […] Au fil des années, l’impact émotionnel du film est devenu très fort chez moi. C’est un bouleversant portrait d’un mariage qui se décompose […]. C’est aussi une douloureuse lamentation pour un certain genre de cinéma qui disparaissait à l’époque, incarné par Fritz Lang et l’impossible adaptation de l’Odyssée qu’il réalise. […] C’est également une profonde rencontre cinématographique avec l’éternité, dans laquelle les mariages perdus et le cinéma semblent se dissoudre. C’est l’un des plus grands films effrayants jamais réalisés”. Difficile d’être plus élogieux que le cinéaste cinéphile par excellence.

Le film est visible sur myCANAL, ainsi qu’en VOD, à découvrir ici.

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Les Choses de la vie (1970)

On aurait tout aussi bien pu considérer Max et les ferrailleurs (1971), dans lequel le comédien incarne un flic froid, obsessionnel et inquiétant. Ou le non moins superbe et émouvant Vincent, François, Paul et les autres… (1974), dans lequel, entre bonheurs et colères, des amis cinquantenaires sont confrontés à leurs doutes et à leurs échecs, mais se raccrochent toujours à leur unité et leur amitié. Mais des cinq collaborations avec Claude Sautet, un cinéaste majeur dans la filmographie de l’acteur, on retiendra leur première rencontre; celle des Choses de la vie. Une oeuvre porteuse d’une charge émotive à fendre les pierres en deux, dans laquelle le comédien incarne un homme victime d’un terrible accident de voiture. Mortellement blessé, il revoit sa vie en accéléré. Il réalise alors l’importance de ces multitudes de petites choses de l’existence, ces joies et ses peines, qui constituent le bonheur de toute une vie… Récit tragique d’un triangle amoureux, de la fuite et la chute d’un homme pris entre deux femmes, son épouse d’un côté (Léa Massari) et son amante de l’autre (sublime Romy Schneider, qui ne fut d’ailleurs pas le premier choix du réalisateur), Les Choses de la vie permet à Sautet de poser les jalons de tous les grands thèmes de ses films suivants, le manque de communication dans le couple et surtout la figure masculine incapable d’extérioriser ses émotions.

Disponible sur myCANAL, ainsi que sur les plateformes VOD.

La Grande bouffe (1973)

Entre 1969 et 1981, De Dillinger est mort aux Contes de la folie ordinaire dans lequel il assure une doublure voix, Michel Piccoli sera fidèle à un autre cinéaste : l’italien Marco Ferreri. Des sept films subversifs qu’ils feront ensemble, La Grande bouffe occupe incontestablement une place de choix. Dans cette fable atroce et dérangeante, quatre amis gourmets et gourmands s’enferment tout un week-end à la campagne et organisent leurs suicides collectif dans une gigantesque bouffe orgiaque. Présenté au festival de Cannes en 1973, c’est peu dire que l’accueil fut houleux pour cette oeuvre, sans doute un des plus gros scandales de l’histoire du festival. Portée par un très grand casting, entre Philippe Noiret, Andréa Ferreol, Marcello Mastroianni, Ugo Tognazzi, et Michel Piccoli donc, qui s’en donne à coeur joie en débridant ici totalement sa folie, La Grande bouffe reste, 47 ans après sa sortie, un brûlot toujours aussi fort sur la décadence et l’aliénation de nos sociétés modernes.

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Habemus Papam (2011)

Plus de cinquante ans après avoir incarné chez Luis Bunuel un prêtre déchirant les pages de son missel pour se faire du feu dans la jungle brésilienne dans La Mort en ce jardin, Piccoli incarnait chez Nani Moretti rien de moins qu’un pape ravagé par le doute et les incertitudes, écrasé par le poids de sa charge, dans Habemus Papam. Un rôle taillé si l’on ose dire à la mesure de l’acteur. Il s’en amusait d’ailleurs, dans un entretien accordé au journal Le Parisien à l’époque, racontant la fois où le réalisateur – acteur Moretti est venu le trouver pour lui faire essayer le costume. “je suis comme les enfants, et tous les enfants se déguisent !” lâchait le facétieux comédien, du haut de ses 85 printemps. Jouant sur deux registres à la fois, la comédie et le drame, irrigué par une mélancolie diffuse et vraie réflexion sur la solitude du pouvoir, le film est admirablement porté par le comédien, qui livre ici son dernier grand rôle.

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