Méthanisation – S. Houot (Inrae) rétablit les vérités quant à l’impact du digestat dans le sol


Sabine Houot, directrice de recherches à l’Inrae, tord le cou aux idées reçues sur la méthanisation et ses impacts sur le sol. En effet, les études l’affirment : le digestat a un effet positif sur la vie des sols.

Est-ce qu’en implantant un méthaniseur sur une exploitation, on diminue les ressources de matière organique à retourner au sol ? Certains parlent notamment de « décarbonisation des sols », qu’en est-il ? Sabine Houot, directrice de recherche à l’Inrae, nous éclaire à ce sujet.

Le digestat favorable au stockage de carbone

« La matière organique est vraiment l’élément qui pilote les sols, souligne Sabine Houot. Le procédé de méthanisation assure une première dégradation de la matière organique biodégradable pour faire du biogaz. La matière organique qui reste dans les digestats est donc stabilisée, ce qui lui permet d’entretenir la teneur des sols. Son efficacité dépend de la quantité de digestat apportée dans le sol, de sa teneur en matière organique et de la fréquence d’apport. Et ça, un agriculteur peut le calculer. »

Les digestats augmentent la vie microbienne des sols

L’experte complète : « Avec les digestats solides, on a tendance à augmenter la teneur en matière organique du sol. Avec un digestat liquide apporté tous les 3 ans par contre, cette teneur n’évolue pas ou très peu.»

La ration du méthaniseur a son importance

Les intrants du méthaniseur conditionnent les caractéristiques du digestat. « Si vous mettez des intrants très ligneux par exemple, vous obtiendrez un digestat très riche en matière organique. »

La directrice explique aussi qu’une culture aura le même retour au sol en passant ou non par la case méthanisation : « Les quelques résultats expérimentaux montrent que ces cultures qu’elles soient laissées au sol, apportées après méthanisation, ou encore digérées par les animaux puis retournées au sol par les effluents d’élevage, permettent d’obtenir la même quantité de carbone qui reste dans le sol. »

La dérive serait de remplacer les cultures principales par des Cive.

En revanche, certains méthaniseurs se basent sur les cultures intermédiaires à vocation énergétiques (les Cive). « Par rapport à une Cipan, une Cive a des rendements supérieurs. Et même en exportant la Cive, ce qui reste au sol (les racines et les chaumes) représente plus de matière organique que la Cipan, donc c’est plutôt positif. Mais ce qui peut poser problème, ce sont les dérives qu’on peut voir dans les systèmes qui favorisent les Cive au détriment des cultures principales à vocation alimentaire. »

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Un fertilisant azoté très intéressant mais très volatil

« Au cours de la méthanisation, l’azote est minéralisé tout comme la matière organique. Sous forme ammoniacale, il devient un engrais très intéressant. Il représente jusqu’à 70 % d’un engrais minéral. Mais il est aussi très volatil. Sur ce point, il est alors conseillé d’enfouir les digestats après épandage. »

Elle alerte cependant les agriculteurs sur le tassement des sols : « Comme pour les lisiers, un épandage avec une tonne sur un sol engorgé, le risque est important. » Mais le matériel évolue et s’allège au fil des années.

Le digestat et les vers de terre

Malgré ces données, certains pointent du doigt les potentiels effets toxiques des digestats sur la vie du sol. Sabine Houot explique : « Comme ils sont très riches en azote ammoniacal (tout comme les lisiers), ils peuvent effectivement avoir un effet toxique sur les vers de terre, notamment l’hiver lorsque le sol est très humide et que les vers de terre sont en surface. Mais les comptages que nous avons réalisés montrent que cette population touchée ne représente que 1 à 2 % de la population totale. Cette perte est d’ailleurs compensée par l’augmentation de la teneur en matière organique dans le sol par le digestat, qui fait augmenter le nombre de lombrics sur la durée par rapport à une parcelle qui ne serait fertilisée qu’avec des éléments minéraux. »

L’Inrae poursuit ses travaux de recherches sur la méthanisation agricole avec des programmes sur la biologie du sol, ses propriétés physiques et la culture de Cive. Un projet Casdar devrait prochainement voir le jour.

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