Chagall sur grand écran, pour l’éternité


Affiche du film «Pour l’éternité» (2021) de Roy Andersson

Affiche du film «Pour l’éternité» (2021) de Roy Andersson

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Le spectre de la peinture plane sur le cinéma de Roy Andersson. Et si c’est le Portrait de la journaliste Sylvia von Harden (1926) d’Otto Dix qui est volontairement inscrit en filigrane dans son sixième long-métrage, Pour l’éternité, il s’agit d’une toile de Marc Chagall, Au-dessus de la ville (1918), qu’il réinterprète pour son affiche. Tout comme le peintre biélorusse, le réalisateur place l’amour au-dessus de tout. À l’image de Marc et Bella survolant leur village natal de Vitebsk, un couple enlacé lévite dans les cieux brumeux d’une ville dont il ne restera bientôt plus rien. Le gris du ciel, la morne cité, le flou vaporeux de la robe — autant que les mines atterrées – imprègnent la scène de mélancolie. Pourtant, ces amants sont une lueur d’espoir dans l’œuvre caustique du Suédois. Flottant au-dessus de Cologne, qui sera ravagée par les bombes, ils sont la preuve que l’amour surpasse – littéralement – l’horreur de la guerre. Face à l’ironie de Pour l’éternité, où le banal se mêle à l’irréel, le choix de cette scène pour l’affiche est une invitation à croire que la finitude humaine réserve bien des instants suspendus.

Lauréat du prix de la mise en scène de la Mostra de Venise en 2019, le film est arrivé dans nos salles au début du mois d’août. Enchaînement de saynètes cocasses, plans fixes, lenteur et beauté blafarde… il reprend les codes qui ont fait le succès de sa Trilogie du vivantChansons du deuxième étage (2000), Nous, les vivants (2007) et Un pigeon perché sur une branche philosophait sur l’existence (2014). Avec cette nouvelle œuvre, errance aussi douce que lancinante, le réalisateur suédois revient à son sujet de prédilection, l’étrangeté de la condition humaine. Et prouve qu’il n’a rien perdu de son génie.

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Marc Chagall, Au dessus de la ville

Marc Chagall, Au dessus de la ville, 1914-1918

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Huile sur toile • 141 × 197 cm • © Archives Marc et Ida Chagall, Paris / ADAGP

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« Pour l’éternité », 2019

de Roy Andersson

Film suédois, 1 heure 16 minutes



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