6 expos à voir en marge de la Biennale de Venise


1. De l’art vidéo dans un ancien hospice

C’est toute la magie de Venise – si ce n’est de l’Italie en général. Une balade dans les rues étroites du quartier du Castello peut mener sans prévenir à un trésor d’architecture du XVIe siècle, qui arrête le regard et intrigue. Coup de chance, l’émulation de la Biennale a niché dans l’ancien hospice dit Ospedaletto et son église Santa Maria dei Derelitti une exposition (gratuite !) de la Fondazione In Between Art Film, basée à Rome. Huit vidéos vous y attendent, inédites car commandées pour l’occasion au Nigérian Karimah Ashadu, au Brésilien Jonathas de Andrade ou encore à l’Afghan Aziz Hazara. Les dispositifs de projection varient au fil des salles, réparties en dédale dans tout le bâtiment : immense écran horizontal dans l’église, boîtes noires intimistes, écrans multiples… D’une cascade à une fête entre marginaux, d’une plongée sous-marine à d’insolites rencontres, les artistes éprouvent les possibles d’un art en mouvement, narratif ou abstrait, séduisant en diable dans la pénombre.

Masbedo, Pantelleria, 2022, dans l’exposition « Penumbra”, Complesso dell’Ospedaletto

Masbedo, Pantelleria, 2022, dans l’exposition « Penumbra”, Complesso dell’Ospedaletto

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Courtesy Masbedo et Fondazione In Between Art Film / Photo Andrea Rossetti

Du 20 avril 2022 au 27 novembre 2022

inbetweenartfilm.com

2. Mary Weatherford et Georg Baselitz dans un palais

Même quartier, mêmes méandres de rues : au bout d’une impasse, le Palazzo Grimani prend le soleil depuis le Moyen Âge, sublimé par les travaux de la famille du doge Antonio Grimani au XVIe siècle. Durant la visite, les plafonds décorés et les sculptures tentent sans cesse de voler la vedette à leurs deux invités : d’abord, au premier étage (observez les très beaux grotesques de l’escalier qui y mène !), le peintre allemand Georg Baselitz (né en 1938) montre quelques travaux récents, dont des toiles réalisées tout spécialement pour les niches de la Sala del Portego. Puis, au deuxième, la Californienne Mary Weatherford (née en 1963) s’est inspirée au début de l’année 2021 de la toile du Titien Le Supplice de Marsyas (1550–1576) pour une série de peintures abstraites, interprétations orageuses où viennent sonner, comme des éclairs, des néons en zigzags. Le palais est vide, les fenêtres sont ouvertes sur la ville… Le moment est beau.

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Mary Weatherford, The Flaying of Marsyas, installation au Museo di Palazzo Grimani

Mary Weatherford, The Flaying of Marsyas, installation au Museo di Palazzo Grimani

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© Photo Matteo De Fina / Courtesy Gagosian

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Mary Weatherford. The Flaying of Marsyas

Du 20 avril 2022 au 27 novembre 2022

gagosian.com

3. Marlene Dumas, star du Palazzo Grassi

Palais du XVIIIe siècle dédié depuis 2005 à la collection Pinault, le Palazzo Grassi impressionne toujours. On n’oubliera pas en tout cas cette grande exposition de Marlene Dumas (née en 1953), peintre originaire d’Afrique du Sud installée aux Pays-Bas, qui s’ouvre sur un documentaire vidéo et se poursuit sur une centaine d’œuvres, de petits formats en grandes toiles monumentales. Qu’y voit-on ? Une maîtrise absolue de la matière peinte, d’abord, qui éblouit avec ses coulures quasi-abstraites et ses fulgurances de précision. Et puis des corps, sa fille à tous les âges, des portraits formidablement bien sentis de Jean Genet, de Pedro Almodóvar ou de Pier Paolo Pasolini, des fesses, des cris et des soupirs… Une peinture charnelle nourrie de lectures et de vie, d’amour et de sexe, rappel comme un coup de poing de la puissance du pinceau.

Vue de l’exposition « Marlene Dumas. open-end » au Palazzo Grassi, avec : Betrayal, 1994, collection particulière et The White Disease, 1985, Glenstone Museum, Potomac

Vue de l’exposition « Marlene Dumas. open-end » au Palazzo Grassi, avec : Betrayal, 1994, collection particulière et The White Disease, 1985, Glenstone Museum, Potomac

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© Photo Marco Cappelletti et Filippo Rossi / Palazzo Grassi / © Marlene Dumas

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Marlene Dumas. Open-end

Du 27 mars 2022 au 8 janvier 2023
Émouvante traversée de quatre décennies de peinture, cette rétrospective dévoile la richesse de l’oeuvre de Marlene Dumas : portraits intimes, dessins érotiques, hommages aux écrivains qui ont nourri son oeuvre, d’Oscar Wilde à Jean Genet… La centaine d’oeuvres réunies compose une symphonie à la fois endeuillée et vivante, expérience unique d’immersion dans la peinture contemporaine !

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www.palazzograssi.it

4. Joseph Beuys en catimini

Intimiste et domestique dans son décor, le Palazzo Cini – érigé au XVIe siècle – est aujourd’hui l’écrin d’une superbe collection réunie par l’entrepreneur et philanthrope Vittorio Cini (1885–1977). Une fois passées les peintures toscanes et les collections de porcelaines anciennes, on s’attardera au dernier étage, qui accueille, comme en ami, l’artiste allemand Joseph Beuys (1921–1986). Pas de feutre, pas de graisse ni même de coyote, mais une série de dessins, l’artiste ayant toute sa vie pratiqué l’art de la feuille et du crayon – on connaît de lui pas moins de 10 000 œuvres sur papier. Presque rien parfois, des gestes restreints souvent, comme des notes, des pensées fugitives. Ces feuilles sont extrêmement modestes, et disent un homme qui explore, qui cherche, qui trempe sa plume dans des encres obscures. Une expo anti-spectaculaire et silencieuse.

Vue de l’exposition « Joseph Beuys : Fine-limbed » avec l’œuvre Backrest for a fine-limbed person (haretype) of the 20th century AD, 1972-1982

Vue de l’exposition « Joseph Beuys : Fine-limbed » avec l’œuvre Backrest for a fine-limbed person (haretype) of the 20th century AD, 1972–1982

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© Joseph Beuys Estate / ADAGP, Paris 2022 / Photo Francesca Occhi / Courtesy Fondazione Giorgio Cini, Venise

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Joseph Beuys : Fine-limbed

Du 20 avril 2022 au 2 octobre 2022

www.palazzocini.it

5. Dans l’œil magique du surréalisme

C’est plus qu’un clin d’œil : avec « Surrealism and magic. Enchanted modernity », la collection Peggy Guggenheim offre à la Biennale de Venise une introduction, une extension. Comment ? En exposant nombre des artistes également choisies par la curatrice de la biennale Cecilia Alemani – comme Leonora Carrington, dont le livre pour enfants « Le Lait des rêves » a carrément donné son titre à cette 59e édition. Remedios Varo ou Leonor Fini sont donc autant de créatrices débridées que l’on retrouve dans l’une comme dans l’autre exposition. Ici, elles sont montrées aux côtés de Max Ernst, de Victor Brauner et de Kurt Seligmann, dans une analyse passionnante de l’intérêt des surréalistes pour l’invisible, l’ésotérisme et l’occulte. Au-delà du propos, cette collection de chefs-d’œuvre permet de redécouvrir des artistes oubliées, et d’assister à un ballet d’images stupéfiantes qui révèlent leur puissance d’invention.

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Surrealism and Magic : Enchanted Modernity

Du 9 avril 2022 au 26 septembre 2022

www.guggenheim-venice.it

6. Chez Carlo Scarpa, conversations d’artistes

Bien sûr, il y a les palais et les églises du XVIe siècle, témoins sublimes et surannés du passage de la Renaissance dans la Sérénissime. Mais Venise est également la ville de Carlo Scarpa (1906–1978), architecte autant que décorateur, soucieux du détail jusqu’à l’emphase. Carlo Scarpa, c’est une petite fontaine qui met en scène le bruit de l’eau dans le pavillon principal des Giardini (là où se découvrent quelques sculptures de Simone Fattal). C’est aussi la Fondazione Querini Stampalia, son jardin minimal et ses espaces joueurs : ici, trois artistes ont accroché des œuvres qui toutes invitent à une contemplation méditative, sans concept ni démonstration de force. On rencontre d’abord, dans les étages, Danh Vo et ses herbiers photographiques, puis un peu partout Isamu Noguchi et ses lampes de papier, et enfin, tout en haut du bâtiment, Park Seo-Bo et ses peintures sculpturales qui jouent avec la lumière. Ne manquez pas, si vous aimez Scarpa, de faire un tour au Negozio Olivetti de la place Saint-Marc, ancienne boutique de machines à écrire délicieuse à arpenter, où se croisent Lucio Fontana et Antony Gormley version petit format.

Vue de l’exposition « Danh Vo, Isamu Noguchi, Park Seo-Bo », à la Fondazione Querini Stampalia

Vue de l’exposition « Danh Vo, Isamu Noguchi, Park Seo-Bo », à la Fondazione Querini Stampalia

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© Photo Ollie Hammick / White Cube

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Danh Vo, Isamu Noguchi, Park Seo-Bo

Du 20 avril 2022 au 27 novembre 2022

www.querinistampalia.org



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