5 chefs-d’œuvre accrochés… à l’envers


1. Paul Gauguin en chutes libres

Paul Gauguin, Chutes du Niagara (titre de 1903)

Paul Gauguin, Chutes du Niagara (titre de 1903), vers 1894

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huile sur toile • 62 × 87 cm • © Bridgeman images

Adjugé, vendu. Lors de la vente judiciaire des biens de Paul Gauguin, le 2 septembre 1903, le romancier et ethnologue Victor Segalen fait l’acquisition d’une toile présentée sous le nom de Chutes du Niagara accompagnée d’une palette composée des mêmes tons blancs, bleus et roses. Rentré dans sa chambre, c’est le déclic. « Retournée, mise en place et contemplée enfin sans blasphèmes ni marchandage, cette toile devenait un paysage breton, village d’hiver sous la neige : quelques maisons de chaume épaulent la ligne d’horizon et se pressent autour du clocher juste central. À gauche, une falaise violette tombe vers un crépuscule. À droite filent des arbres maigres. Tout le sol est fait de neige ruisselant de lumières fondues. » Village breton sous la neige. Tel est le titre attribué aujourd’hui au tableau. À découvrir, dans le bon sens, au musée de Pont-Aven.

Paul Gauguin, Village breton sous la neige

Paul Gauguin, Village breton sous la neige, vers 1894

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huile sur toile • 62 × 87 cm • ©Bridgeman images

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Musée de Pont-Aven

Ouvert tous les jours de 10 h à 18 h

2. Matisse sens dessus dessous

Henri Matisse, Le Bateau (présenté dans le mauvais sens au MoMA en 1961)

Henri Matisse, Le Bateau (présenté dans le mauvais sens au MoMA en 1961), 1953

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Papier découpé et gouache • © Succession Henri Matisse / Photo Archives Henri Matisse

« La honte ! », crieraient les mauvaises langues. En 1961, dans le cadre de l’accrochage « The Last Works of Matisse : Large Cut Gouaches », le MoMA présente Le Bateau du peintre français dans le mauvais sens : le sujet en bas ; son reflet en haut. Effet miroir de malheur ! Parmi les 116 000 visiteurs, ni Pierre Matisse, le fils de l’artiste, ni les conservateurs de l’institution new-yorkaise ne remarquent l’erreur. Jusqu’à ce que Geneviève Habert, agent de change française travaillant à Wall Street, compare l’œuvre à sa reproduction dans le catalogue d’exposition. Son sens de l’observation se heurte néanmoins au mépris d’un agent de sécurité, qui ne manque pas de blâmer la maison d’édition. Et l’œil de lynx de se tourner vers le New York Times : « Jamais Matisse n’aurait placé le motif le plus détaillé en bas, et sa forme simplifiée en haut ». Son témoignage remonte aux oreilles du musée qui n’a plus d’autre choix : plaider « l’étourderie ».

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Henri Matisse, Le Bateau

Henri Matisse, Le Bateau, 1953

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morceaux de papier découpés et gouache • © Succession Henri Matisse / Photo Archives Henri Matisse

3. Van Gogh à l’envers, et contre tous

Vincent Van Gogh, Hautes herbes et papillons (présenté dans le mauvais sens à la National Gallery en 1965)

Vincent Van Gogh, Hautes herbes et papillons (présenté dans le mauvais sens à la National Gallery en 1965), 1889

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huile sur toile • 64.5 × 80,7 cm • © Bridgeman images

Un regard inattentif n’y verra qu’une vaste étendue de verdure. Une route discrète divise pourtant ce champ fertile entre deux, renseignant le sens de lecture du tableau. En 1965, une adolescente venue à la National Gallery de Londres, à l’occasion d’une sortie scolaire, relève une double incohérence dans Hautes herbes et papillons (1889) de Vincent Van Gogh : ladite route coupe étrangement la composition et la végétation qui l’encadre pointe vers le bas. La jeune fille se précipite vers un gardien pour lui faire part de sa découverte. En vain. Heureusement, les équipes de conservation lui donnent finalement raison… et, en prime, une explication. Le tableau aurait été décroché, quinze minutes seulement, en vue d’une séance photo, et les régisseurs auraient oublié, la remettant en place, son orientation d’origine. Les pauvres connaissaient peu ou mal le travail de Van Gogh ! Un argument qui fleure la mauvaise foi…

Vincent Van Gogh, Hautes herbes et papillons

Vincent Van Gogh, Hautes herbes et papillons, 1890

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huile sur toile • 64.5 × 80.7 cm • © Bridgeman images

4. Les pavots-pivots de Georgia O’Keeffe

Georgia O'Keeffe, Oriental Poppies (présenté dans le mauvais sens au Frederick Weisman Art Museum dans jusqu’en 1988)

Georgia O’Keeffe, Oriental Poppies (présenté dans le mauvais sens au Frederick Weisman Art Museum dans jusqu’en 1988), 1927

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huile sur toile • 101 cm × 76 cm • Coll. the Frederick R. Weisman Art Museum at the University of Minnesota, Minneapolis

L’artiste américaine Georgia O’Keeffe avait une passion pour les fleurs, qu’elle changeait du bout de son pinceau en abstractions. En 1928, le portrait de deux pavots juxtaposés, plus connu sous le nom d’Oriental Poppies, voit le jour pour finalement atterrir une dizaine d’années plus tard au Frederick Weisman Art Museum, le musée de l’université du Minnesota. La toile y demeure exposée à la verticale pendant des années, jusqu’au jour où, en 1986, Lyndel King s’aperçoit du « contresens » en consultant le dossier de l’œuvre, lequel spécifiait une orientation à l’horizontale. Et la directrice de l’établissement, déterminée à rectifier le tir, de s’exclamer, malgré tout : « What the heck! It looks terrific either way ! » (Non mais ! L’œuvre a l’air sublime dans les deux cas).

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Georgia O'Keeffe, Oriental Poppies

Georgia O’Keeffe, Oriental Poppies, 1927

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huile sur toile • 101 cm × 76 cm • Coll. the Frederick R. Weisman Art Museum at the University of Minnesota, Minneapolis

5. Turner tout retourné

En 1862, la presse britannique rapporte la confusion d’un directeur de galerie face à une toile de William Turner. L’exposant, craignant de l’avoir accrochée à l’envers, aurait envoyé un courrier à l’artiste pour recueillir ses instructions. Et le peintre anglais de rétorquer : « Retournez-la », soit « Turn her », en anglais. L’anecdote, légèrement discréditée par ce jeu de mots, entre l’injonction et le nom du peintre, et par le manque d’informations concrètes (Quelle œuvre ? Dans quelle galerie ? Tenue par qui ? ), contribue à dénoncer l’aspect « atmosphérique » des œuvres de Turner, à qui la critique reprochait souvent de signer des compositions illisibles, pour ne pas dire abstraites. Un bel exemple de flou artistique !

William Turner, Vapeurs dans une tempête de neige

William Turner, Vapeurs dans une tempête de neige, 1842

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91 × 122 cm • © Luisa Ricciarini/Leemage via AFP



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